Et si on parlait de moi, un peu...

"Rien ne stoppe mon avancée" (Fabe)

 

    Moi, je suis un mec gentil.

    Je sais que c'est pas vraiment à la mode ni ce qui marche le mieux avec les meufs, mais j'en suis plutôt fier, car la plupart du temps, le karma fonctionne et me le rend bien. Seulement, il arrive que ce coquin soit en maintenance technique. Quand ça arrive, il semblerait que quelque chose s’inverse et que je devienne, comme pour tester mon indétrônable gentillesse, une sorte d’aimant à méchanceté gratuite et intense… Bref, j’ai un truc à vous raconter :

    Un après-midi de février, je reçois un coup de fil d’un ami à moi que nous appellerons Jacques-Jacques (afin de garder son anonymat et d’assouvir ma passion pour les prénoms composés farfelus). Jacques-Jacques travaille pour la mairie de la ville à côté de chez moi (au service culturel). M’ayant vu sur scène lors d’un tremplin musical, il avait apparemment apprécié ce que j’avais fait et me l’avait dit ce jour-là.
    Je reçois donc ce coup de fil un mardi vers 15h, et à l’autre bout du fil, Jacques-Jacques me propose de faire la première partie, l’été prochain, d’une grosse tête d’affiche que l’on nommera ici Claude François (afin de garder son anonymat, également, et d'éviter les emmerdes).

    Comme j’aime bien faire des parenthèses et présenter le contexte comme il faut, nous allons maintenant faire une pause afin de préciser quelques éléments qui vous aiderons peut-être à vivre comme je l’ai vécu cet épisode étrange de ma vie.
    J’ai appris en 2009 que j’avais un « adénome hypophysaire ». Il s’agit d’une tumeur au cerveau peu maligne mais non opérable. J’ai donc un traitement relativement lourd qui permet de contenir l’adénome et de le réduire au maximum. Une fois habitué à mon traitement, je ne ressens plus d’effets secondaires, mais en début de traitement, mon appétit et mon sommeil sont complètement bousillés…

    Quand Jacques-Jacques me donne ce coup de fil, cela fait 2 nuits que je ne dors pas plus de 3h, je dois donc être pâle, avoir les yeux légèrement rouges, mais surtout, je suis à fleur de peau. Ce serait ma deuxième scène, devant environ 1000 personnes, payée…. Le top, quoi ! Une sacrée visibilité, un pas dans le truc, je suis chaud bouillant. Je remercie chaleureusement Jacques-Jacques, qui me demande de lui envoyer très rapidement une petite présentation et un visuel. J’appelle immédiatement le DJ avec qui j’avais fait le tremplin musical, que l’on appellera ici Matis, car c’est comme ça qu’il s’appelle. Malheureusement, celui-ci n’est pas du tout disponible. Cela ne me décourage pas, et en éternel optimiste, je réfléchis déjà à des tonnes de pistes pour me trouver un DJ. Je rentre chez moi, et là on entre dans le vif du sujet, car je ne peux m’empêcher, en bon naïf, de publier un statut sur ma page Facebook. Vous avez vu ma page Facebook ? Si la réponse est non, je ne vois pas du tout ce que vous attendez pour cliquer ici. Si la réponse est oui, vous êtes sans doute de ma famille ou un de mes potes.
    J’avais sur celle-ci environ 107 fans à ce moment-là, autant dire autant de visibilité qu’un mime dans un centre pour aveugles.
    Je marques donc un truc du genre : « Ma propre personne en première partie de Claude François l’été prochain, Why not ? » histoire de faire savoir à la poignée de gens qui me suivent (3 cousines de voisins et un fan de Tolkien) que je suis super-content, bien que je ne sois pas encore certain du truc.
    Quelques commentaires arrivent, essentiellement des « je suis content(e) pour toi » puis un pote met un lien vers une vidéo où l’on se moque gentiment de Claude François et quand une copine me marque qu’elle est contente pour moi mais pas fan du gars, je lui dit que moi non plus, mais que ce Claude à l’air très sympa et que ce n’est pas spécifique à lui si je n’aime pas sa musique, mais à son style : je n’aime pas le « RnB français de lover » (je n’ai marqué que « RnB » en vrai). Au début je compte faire nuit blanche afin d’être assez fatigué pour dormir tôt le lendemain, mais vers 9h (du matin) je me dis que je vais quand même dormir quelques heures.
    Je me lèves vers 12h30 fais quelques trucs et Jacques-Jacques me rappelle pour me presser au niveau de la présentation et du visuel. Je me mets donc sur Gimp, prends quelques heures pour faire un visuel potable, écris une présentation à la 3ème personne (vite fait, c’est désagréable de se décrire soi-même en tant qu’artiste), lui envoie le tout le plus vite possible, sans même prendre le temps de relire ma présentation. Il est à ce moment-là 19h42, et on est mercredi. C’est aussi à ce moment-là que je commets l’une des plus graves fautes d'inattention de ma vie. Je ne comprends pas que s’il me presse ainsi, c’est que ce visuel et cette bio ne sont pas pour Jacques-Jacques lui-même, mais pour la boîte de production de Claude François…..
    Je fais d’autres trucs jusqu’à 10h du matin ( je vous rappelles qu’en raison de mon sommeil flingué, je n’ai dormi que quelques heures les derniers jours). Je me couches vers 10h et à 11h mon téléphone sonne. Jacques-Jacques me dit que c’est foutu, que je me suis grillé, que j’aurais jamais dû poster ça sur Facebook, qu’il vient d’avoir les producteurs de Claude François et que j’aurais vraiment dû faire plus gaffe, etc. Son ton est celui d’un DRH chargé de virer un pote à lui, mais qui l’accepte car son pote a quand-même chié sur le bureau du patron. Je lui explique que je ne comprends pas, que je n’ai rien fait de mal, lui demande plus précisément ce qui m’est reproché. Il ne peut me le dire exactement car il n’avait même pas FB sous les yeux quand il a été contacté par les fameux producteurs, qui lui ont dit que je manquais de respect envers leur artiste, qu’en plus je ne savais pas écrire et que de toute façon, j’avais parlé sur FB d’un concert qui n’avait même pas été annoncé officiellement par eux (et que donc, c’était foutu, quoi !). Mais comme Jacques-Jacques est tout comme moi un optimiste aguerri, il me dit qu’il a une dernière idée derrière la tête, mais de ne pas me faire trop d’espoir non plus car la situation a l’air bien bien morte. Je le laisse donc en lui disant que de mon côté, je vais supprimer ce statut, ce que je fais immédiatement (sans penser à faire une copie d’écran malheureusement). Je me recouche, et me réveille vers 20h (quand on ne travaille pas de nuit, c’est hyper chelou). Je ne peux penser qu’à cette histoire, je n’en reviens pas. La rapidité du truc, la violence du truc… Je ne comprends pas ! J’occupe ma nuit, et vers 10h, je me couches. Je tourne 30mn dans mon lit, et soudain, j’ai un flash !
    Un jeune que je connais du Net (on est tous les deux administrateurs d’un forum sur le Hip Hop) avait marqué un commentaire sur mon statut. Un commentaire comme jamais je n’aurais pu en marquer, pas un commentaire de gentil… Un commentaire genre : « Ah ben il vient de vers chez moi, Claude François, c’était un boloss, j’ai des sacrés dossiers sur lui, comme une vidéo où il se fait victimiser, un jour faudra que je te montre ça, lol » Non seulement je n’ai pas « liké » ce commentaire, mais je me suis rendu compte quand il m’est revenu que je l’avais même zappé de ma mémoire. Quand je lis ce genre de commentaire, ils ont tellement peu d’intérêt pour moi… Si le truc est vrai, ça ne m’intéresse pas, voir quelqu’un se faire « victimiser »… Pas mon kif.. Et si le truc est faux, c’est juste un jeune qui veut se faire mousser, c’est pas bien méchant, la vidéo n’existe même pas, ce qu’a voulu dire la personne c’est juste : « he he moi je l’ai déjà rencontré avant que ce soit une star, hein ! »
    J’en profites ici pour envoyer un message personnel à celui ayant écrit ce com, car je sais qu’il y a une chance que tu me lises : Reste du côté des gentils, si la merde arrive, c’est toujours meilleur de pouvoir se dire qu’on est certain que c’est pas de sa faute ;)
    Je contacte donc Jacques-Jacques et le rencontre pour mieux comprendre dans quel contexte il a eu les producteurs, quelle chance j’ai qu’il puisse rattraper le coup, et pour lui dire ce qu’à mon avis, les gars ont mal pris à la base, et que ce n’est pas moi qui l’ait écrit. A ce moment-là de l’histoire, on est Vendredi, Il me dit que le gars avec qui il traite d’habitude (le supérieur de celui avec qui il a traité cette fois-ci, d’après ce que je comprends) était en vacances et qu’il essaierai de l’avoir en début de semaine suivante.

    L’histoire aurait pu se finir bien, tout le monde se serait bien compris, les choses seraient rentrées dans l’ordre et j’aurais eu droit à ma scène en première partie de Claude François… Il n’y aurait eu aucun problème, et nous aurions continué à faire nos affaires, Claude François de son côté et moi du mien. Ça n’aurait rien changé pour lui, et ça aurait fait beaucoup pour moi. Mais dans la vraie vie, ceux qui prennent les décisions ne sont pas forcément les plus éclairés, et bien souvent les gentils se font niquer à la fin de l’histoire… Nous sommes mercredi et Jacques Jacques vient de m’appeler, c’est mort pour cette première partie.

    La prochaine fois, le gentil gagnera…

    Bilbo

 

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